Dépendance aux écrans : comment re-capter l’attention des enfants ?

Dépendance aux écrans : comment re-capter l’attention des enfants ?

Portrait de Sarah Limorté

Professeure de yoga à l’Espace Le Chemin Vert, Sarah Limorté est par ailleurs membre active de l’association Lève les yeux !, qui promeut la déconnexion et la reconquête de l’attention.

Anthropologue de formation, elle vient d’écrire un article sur la dépendance des jeunes aux écrans à partir de données empiriques récoltées sur le terrain lors d’ateliers de sensibilisation auprès d’enfants et d’adolescents.

Quels sont les principaux problèmes liés à la dépendance aux écrans chez les enfants ?

Les effets les plus évidents de la surexposition aux écrans sont leur impact sur le sommeil et sur les interactions sociales de façon générale. Sur le plan cognitif, cela peut avoir de lourdes conséquences sur le développement neurologique (troubles de l’attention et du comportement, retards de langage) et, plus généralement, des troubles de la vue, de la mémoire et une perte de la capacité de concentration.

Elle a des conséquences néfastes également sur le bien-être et la santé mentale des individus, notamment par l’usage intensif des réseaux sociaux qui isolent en substituant les relations humaines par des relations virtuelles, et érodent l’estime de soi.

Enfin, la sédentarité liée à un usage excessif des écrans participe indirectement d’une véritable épidémie d’obésité dans le monde.

Comment ton association aborde-t-elle cette problématique au niveau individuel et collectif ?

L’association met en œuvre, d’une part, des ateliers de sensibilisation auprès des enfants et des adultes, d’autre part, des actions de plaidoyer à l’échelle individuelle et collective. À Marseille, nous sommes intervenus dans 66 écoles et collèges et 8 centres sociaux, de septembre 2021 à juin 2023, pour un total de 1 900 enfants et adolescents touchés.

Quelles actions ont été menées auprès des enfants ?

Nous avons proposé des ateliers spécifiques aux écoles primaires, développés avec l’aide d’une psychologue, pour aider les enfants à identifier les dangers en ligne, comprendre la nature illégale de certains actes et encourager la communication avec des adultes de confiance.

Des expériences pratiques, comme l’enfermement des smartphones dans des pochettes à verrouillage magnétique, sont également utilisées pour sensibiliser les élèves au comportement addictif. Cette expérience les interpelle sur la nature de l’attachement à la technologie et sur le moment où le plaisir prend le contrôle sur notre capacité de discernement.

D’autres ateliers traitent de « l’économie de l’attention », pour comprendre de quelle façon les neurosciences et la captologie sont utilisées pour manipuler nos automatismes et nous rendre dépendants aux écrans. Ces sessions incluent l’analyse des stratégies de captation dans les applications et jeux vidéo (notifications, vidéos émotionnelles, scroll infini…), conçues pour attirer et prolonger l’attention des utilisateurs.

Que peuvent faire les adultes face à tout cela ?

La reconquête de notre attention passe par une prise de conscience collective et une volonté ferme des adultes et éducateurs de repenser leur rapport aux écrans et au numérique pour pouvoir montrer l’exemple aux plus jeunes !

Comme pour tout comportement addictif, il convient d’établir des règles strictes auxquelles se tenir afin de reconquérir progressivement notre attention :

au niveau individuel, mettre en place des gestes simples pour ne plus être « appelés » par notre smartphone de façon intempestive : désactiver les notifications, utiliser le mode silencieux et avion le plus souvent possible ;

dans la sphère privée, faire appel à la technique des « 4 PAS » : pas d’écrans le matin au réveil, pas d’écrans pendant les repas, pas d’écrans dans la chambre à coucher, pas d’écrans le soir avant de dormir. Certaines familles ont instauré par exemple le principe de « boites à téléphones » dans lesquelles tout le monde dépose son portable au moment des repas.

Notre cerveau étant une machine à habitudes, il est préférable d’avancer de façon progressive, en promouvant par exemple des activités de remplacement (lecture, discussions, jeux de société…). La bonne nouvelle est que l’effort demandé décroît avec le temps !


Pour aller plus loin…

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